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Dimanche 31 juillet 2022
Culte à la chapelle d'Anières
prédication du pasteur Marc Pernot
« Je connais les projets que j’ai formés sur vous, dit l’Éternel, projets de paix et non de malheur, afin de vous donner de l’avenir et de l’espérance ! » (Jérémie 29:11)
Dieu est comme cela. Une pure source de bien et de vie. Et de liberté : il ne forme pas un unique projet devant nous qui serait à prendre ou à laisser, Dieu nous ouvre une multitude de nouvelles bonnes voies possibles.
Contrairement à ce que pensaient certains Dieu n’est source que de bons projets, et il n’est jamais indifférent aux malheurs du monde. Au contraire, nous dit Jérémie : Dieu est source de paix et non de malheur. Ce n’est donc pas malgré l’existence du mal et de la souffrance que nous croyons en Dieu. Au contraire : nous avons confiance en Dieu et nous voulons marcher avec lui car nous sentons que Dieu est depuis les origines la source profonde qui écarte le chaos pour nous donner un avenir de lumière et de vie, de paix et de liberté.
Seulement oui, ce salut ne vient pas comme par un coup de baguette magique, car Dieu n’est pas un magicien, ni un tyran qui imposerait sa volonté par la force. C’est pourquoi cet Évangile selon Jérémie nomme ici Dieu par son nom « YHWH » (l’Éternel), ce qui signifie Dieu en tant que source d’être, comme amour et pardon, non pas comme un puissant Seigneur. Un Dieu qui vient comme un souffle léger et non comme un ouragan, nous dit le prophète Élie (1 Rois19:12).
Notre salut vient de l’Éternel. Pour quel avenir et quelle espérance, puisque nous savons très bien que nous allons mourir un jour où l’autre ? Il n’est pas question dans la Bible de nous renvoyer à la vie future, ou à une fuite dans le spirituel pur. Ce serait bien réducteur pour la vie en ce monde, voulue par Dieu comme une bénédiction. C’est pour aujourd’hui que l’Éternel travaille afin de faire brèche à notre malheur et nous donner un avenir, une espérance.
C’est ce que nous voyons en particulier dans ce passage où l’apôtre Paul que nous avons entendu : « nous ne perdons pas courage, car même si notre extérieur humain se détruit, notre intérieur humain se renouvelle de jour en jour. » (2 Corinthiens 4:16) Paul précise bien que ce dont il parle est une vie qui est donnée en notre corps, dans notre chair mortelle (2 Cor. 4:10-11). Cette espérance n’est pas d’arrêter le temps car Paul parle du temps continuant à travailler nos corps et notre Esprit. Cette espérance n’est pas non plus comme si Dieu pouvait nous favoriser en nous donnant d’avoir plus de chance. Paul ne nous trompe pas là-dessus quand il témoigne du fait que nous sommes, nous comme lui et comme Jésus : pressés de toute part, piégés dans des impasses, pourchassés, terrassés.
Il existe une force qui apporte une vie dans notre vie, une force victorieuse de nos difficultés, et qui fait que le temps travaille pour nous et non seulement contre notre corps. Pour en parler, Paul utilise un mot particulier en grec, un mot que nous connaissons aussi en français : le mot d’hyperbole (ὑπερβολή). Paul parle de « la puissance hyperbolique de Dieu » au cœur de nous-même, cette même puissance hyperbolique qui est à l’origine de la création quand Dieu a dit « que la lumière brille au milieu des ténèbres », « et la lumière fut. » (Genèse 1:1-3)
Est hyperbolique c’est ce qui est hors de notre cadre habituel, qui dépasse nos limites finies, mortelles, souffrantes, qui déborde des limites de notre moi. Les penseurs latins parleront de transcendance.
C’est un petit peu polémique de la part de Paul de parler ainsi d’hyperbole à ses lecteurs grecs de Corinthe. Car des philosophes grecs invitaient à supporter les difficultés de la vie par la modération en ne s’attachant qu’à ce qui ne risque pas d’être atteint par le malheur. C’est en quelque sorte une réduction de notre être. Selon Paul, notre espérance est au contraire par le haut et non par le bas, c’est une hyperbole, un supplément de création, un débordement créatif, une puissance qui agit en nous qui ne vient pas de nous-même, de notre sagesse mais du Créateur.
Ce n’est pas de la théologie abstraite. Les exemples que donne Paul sont concrets : « Pressé de toute part mais non écrasé », « Terrassé mais non détruit ». On peut penser à toute situation où nous sommes terrassé ou bloqué, d’où nous viendra un avenir pacifié ? Ce n’est pas en traitant de sans importance ce qui nous arrive. En même temps nos forces sont à terre... D’où nous viendra le secours ? (Psaume 121) Par la puissance de création et de lumière dont parle Paul, puissance qui donne de se lever ; de ressusciter au-delà de nos forces anciennes, de faire brèche même dans les hautes murailles ce qui nous enfermaient, et de vivre, d’avancer. C’est effectivement hyperbolique car la puissance qu’il faut pour cela dépasse les forces humaines, elle vient d’un autre niveau, c’est d’un renouvellement, d’un commencement ajouté dans notre création continuée, progressive. Créer est le quotidien de notre Créateur.
« Nos détresses actuelles ne font pas le poids , nous dit Paul, devant la gloire éternelle de Dieu et ce qu’elle produit en notre faveur, d’hyperbole en hyperbole. » (2 Corinthiens 4:17)
« La gloire de l’Éternel » : c’est comme cela que le livre de l’Exode parle de la puissance de Dieu qui sauve les hébreux de l’esclavage, cette puissance de franchissement de toutes sortes d’obstacles, de cette source qui les instruits et les guide, qui les nourrit et les abreuve dans leurs déserts jusqu’à la vie bonne que Dieu espère pour eux. Cette puissance n’est pas épuisée, c’est pour nous que ce récit de l’Exode est raconté, c’est de nous dont parlent ces textes. La gloire et la joie de l’Éternel sont de nous accompagner pas à pas dans la marche de notre vie, de nous libérer, de nous renouveler. D’hyperbole en hyperbole. Ce n’est pas une simple promesse, c’est l’expérience de la vie croyante. C’est un salut qui vient au rythme d’une marche, au pas d’une caravane dans nos déserts. Cette progressivité ne doit pas nous décevoir, nous qui sommes pressés, c’est nécessaire car tout bon travail de création se fait ainsi.
Encore une chose : quelle est cette personne à qui il est donné, dans son corps de chair, de recevoir de Dieu un avenir et une espérance ? C’est chacune et chacun de nous, comme je viens de le dire, car Dieu aime chaque personne sans exception. Cette personne que Dieu sauve c’est donc la personne individuelle mais c’est aussi « le corps du Christ », c’est à dire l’humanité, et c’est chaque groupe d’humains.
En effet, l’être nouveau que le Christ inaugure, c’est à la fois la personne individuelle renouvelée par l’Esprit, et c’est également l’humanité réconciliée par l’Esprit en un corps où chaque personne individuelle a sa place et se soucie des autres (1 Corinthiens 12-13). L’être nouveau c’est l’un et l’autre, l’individu et le collectif. Ces deux chantiers de création sont menés en parallèle. C’est le salut de l’individu sans l’individualisme. C’est le salut de l’ensemble de la création sans oublier la valeur sacrée que chaque personne a pour Dieu et pour l’ensemble.
C’est à souligner en ce jour de fête nationale Suisse, car il y a quelque chose de cela dans ce pays unique qui vit effectivement comme une richesse de multiples langues, cantons, communes et individus grâce à un sens du collectif et de la liberté. C’est particulièrement important dans notre monde d’aujourd’hui, je pense, où tout est devenu si proche et si rapide. Il faut un avenir pour chacun et un avenir pour l’ensemble.
Dans la Bible hébraïque, l’accent était mis sur l’ensemble, Dieu faisant alliance avec son peuple et avec l’humanité. Le Christ a mis l’accent sur l’importance de l’individu : chacune et chacun est en ligne directe avec Dieu, compte pour Dieu. Du plus simple au plus savant, c’est chaque individu qui reçoit l’Esprit devenant ainsi prophète ou prophétesse, devenant cohéritier avec Christ du Royaume de Dieu. Cette révolution a profondément marqué notre civilisation, pour le meilleur. Il ne faut cependant pas que cela nous fasse oublier l’importance de l’ensemble. Car aucun avenir, aucune paix, aucune espérance ne vient à personne si l’ensemble autour d’elle est en chaos. Ce n’est pas possible car l’humain est un être social et spirituel, connecté aux autres et à Dieu. C’est pourquoi Jésus valorise l’individu et la qualité de ses relations avec l’Autre et avec les autres.
Comment donc la puissance hyperbolique viendra ouvrir un avenir et une espérance pour cette humanité et pour cette planète ? Comptez sur Dieu pour y travailler sans cesse. Bien sûr. Comment y travaillera-t-il ? « Vous recevrez une puissance, nous a annoncé le Christ : le Saint-Esprit survenant sur vous, et vous serez mes témoins jusqu’aux extrémités de la terre. »(Actes 1:8) La suite de ce récit précise que c’est effectivement chaque personne individuelle qui reçoit l’Esprit (Actes 2:3). Le salut passe bien par l’individu alors même que l’universel n’est pas oublié, bien sûr.
Voilà donc que vous, en tant que personne, avez reçu cette puissance hyperbolique. Et aujourd’hui, le monde en a un ardent besoin pour que Dieu puisse ouvrir un avenir, une espérance et une paix nouvelle en ce monde qu’il aime (Jean 3:16). Pour cela, Dieu a besoin d’au moins quelques professeurs qui soient un petit peu hyperboliques, il a besoin de chercheurs et d’artisans, de banquiers et d’artistes, il a besoin de parents et de grands parents, de bons voisins et de simples humains portant parfois un éclair d’hyperbole, ne serait-ce que de temps en temps : ce sera un ferment de renouvellement du monde, et nous serons sauvés.
Que Dieu nous soit en aide.
Amen.
Pour débattre sur cette proposition : c'est sur le blog.
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Car je connais les projets que j’ai formés sur vous, dit l’Éternel,
projets de paix et non de malheur,
afin de vous donner un avenir et de l’espérance !
Le Dieu qui a dit : que la lumière brille au milieu des ténèbres, c’est lui-même qui a brillé dans nos cœurs pour faire resplendir la connaissance de sa gloire de Dieu sur le visage du Christ. 7Ce trésor, nous le portons dans des vases d’argile, pour que cette puissance hyperbolique soit de Dieu et non de nous-mêmes.
8 Nous sommes pressés de toute part, mais non écrasés ; dans des impasses, mais non sans issues ; 9pourchassés, mais non rejoints ; terrassés, mais non détruits : 10 portant sans cesse la mort de Jésus en notre corps de sorte que la vie de Jésus soit aussi manifestée en notre corps. 11Toujours, en effet, nous les vivants, nous sommes livrés à la mort à cause de Jésus, de sorte que la vie de Jésus soit aussi manifestée dans notre chair mortelle...
16 C’est pourquoi nous ne perdons pas courage, même si notre extérieur d’humain se détruit, notre intérieur d’humain se renouvelle de jour en jour. 17De sorte que nos détresses actuelles sont légères par rapport au poids que la gloire éternelle produit en notre faveur, d’hyperbole en hyperbole. 18C’est pourquoi nous ne fixons pas notre regard sur les choses visibles, ce qui est visible étant provisoire, alors que les invisibles sont éternelles.
5:1 Nous le savons : si notre demeure terrestre, qui est comme une tente, se détruit, nous avons en Dieu un édifice qui n’est pas fait de mains humaines, une demeure éternelle dans les cieux.