(écouter, culte entier, imprimer la feuille)
Dimanche 29 mai 2022
Culte au temple de Vandœuvres
prédication du pasteur Marc Pernot
Nous aurions largement de quoi bondir de joie, sauter en l’air et danser comme cet homme le fait dans le temple de Jérusalem à la fin de cette histoire, car nous sommes déjà, en l’état, un miracle d’évolution. Les atomes qui nous constituent auraient pu naturellement rester à l’état de poussière ou d’énergie. Pourtant, cette matière a pu devenir un être vivant avec sa personnalité propre, sa capacité à aimer, à comprendre, à espérer, capable de rire et d’inventer des choses jamais vues, des paroles jamais entendues, un être qui est même « capable de Dieu » comme le disent les théologiens. Cela aurait de quoi nous faire danser de joie comme le fait cet homme pour remercier Dieu.
Au début de ce livre des Actes que nous lisons aujourd’hui, les apôtres comptaient sur Dieu pour poursuivre et achever enfin son travail d’évolution, c’est vrai qu’il reste du travail à faire pour un monde parfait. Ils reconnaissent en Jésus le Christ, le Sauveur ultime envoyé par Dieu. Ils pensaient qu’avec lui, Dieu amènerait enfin le monde à sa perfection : que c’en serait fini des maladies, des catastrophes, des guerres, et de la détresse sur terre. Au début du livre des Actes, les apôtres regardent vers le ciel, impatients. Le chapitre suivant de ce livre nous les montre vivant en communauté après la disparition de Jésus (Actes 2:44-45, 4:32...). Ils ont arrêté de travailler, ils vendent leurs outils de production et vivent sur le produit et prient en attendant la réalisation imminente de leur rêve d’un renouvellement du monde par Dieu. Ils vont être déçus, cette première église de Jérusalem va vite se retrouver « sans or ni argent », comme le disent ici Pierre et Jean. L’apôtre Paul devra organiser des collectes dans tout le bassin méditerranéen pour venir en aide aux démunis de Jérusalem (Rom 15:26).
Les premiers chrétiens vont alors comprendre que Dieu n’est pas un magicien, que sa puissance est celle d’une inspiration qui nous est offerte en Christ, que Dieu n’a pas d’autres mains que les nôtres pour nourrir un enfant affamé, par exemple. C’est vrai que Jésus est le Christ qui apporte le salut du monde. Seulement ce salut n’est pas un spectacle auquel on assiste, c’est en nous que Dieu vient comme un souffle puissant, une inspiration pour que nous agissions et apportions effectivement, concrètement, des gestes de transformation du monde, à notre façon, comme nous le pouvons, à hauteur d’humain. C’est nous qui sommes envoyés à la suite du Christ pour faire fleurir la justice et réconcilier les humains avec leur Dieu.
C’est ce que vont faire Pierre et Jean dans le texte que nous lisons. Jésus n’est plus là pour annoncer l’Évangile, il n’est plus là pour soigner les personnes en détresse dans leur corps, leur esprit et leur foi. Ses disciples sont comme des petits poussins qui apprennent à voler de leurs propres ailes, afin de prendre la suite de Jésus.
Ils vont le faire chacun avec sa personnalité. Il n’y a pas plus différent que Pierre et Jean sur ce plan là. Pierre est un homme plein de force et d’enthousiasme, nous le voyons dans les évangiles : il se lance, il ose, il affirme, il se jette à l’eau, parfois il fanfaronne un peu. Jean est au contraire, le doux et le mystique de la bande, l’ami proche de Jésus.
Pierre et Jean se sont constitué en équipe pour prendre la suite de Jésus. C’est un appel à nous y mettre tous et à communiquer entre nous. Comme les cellules composant les différents membres du corps, chacune a sa spécificité et pourtant elles sont toutes issues de la même cellule au départ et composent un seul corps vivant.
En même temps, il serait bon que l’Esprit réveille en chacun de nous le Pierre et le Jean qui existent. La force et l’enthousiasme de Pierre sommeille parfois en nous. Il y a aussi un Jean qui est en nous, qui rêve, qui contemple et qui aime, et lui aussi est parfois en sommeil, comme n’espérant plus et oubliant Dieu. Il est bon que l’Esprit réveille en nous ce Pierre et ce Jean et qu’ils marchent la main dans la main, que chacun stimule et compense l’autre. Que notre être soit ainsi riche de ces deux dimensions unifiées, pacifiées : notre fougue parfois trop fougueuse et parfois endormie, notre intériorité parfois trop déconnectée et parfois oubliée devant les soucis du quotidien. L’une et l’autre sont réconciliée dans cette marche de Pierre et de Jean, quand ils se mettent en route pour prier le même et seul Dieu.
En effet, c’est ce qu’ils font : « Pierre et Jean montaient ensemble au temple, à la neuvième heure » nous dit le texte. Qu’est-ce qui unit Pierre et Jean ? Ce n’est même pas la prière en elle-même car ils ne sont encore qu’en chemin vers le temple. Ce qui les unit c’est l’intention de prier. Cela suffit pour les unir dans une élévation de leur être et de leur équipe. Au point qu’ils vont déjà être capable de salut pour un homme, à l’image de ce qu’aurait fait Jésus.
Ce texte semble nous dire ainsi que le plus important dans le culte n’est finalement pas le culte, c’est quand nous sommes en chemin pour aller au culte car c’est alors que se creuse en nous une attente de quelque chose qui pourrait venir de Dieu et que nous ne connaissons pas encore. Dieu peut alors nous donner ce supplément d’être qu’il espérait pouvoir nous apporter. Notre intention de prier, déjà, répond à l’espérance de Dieu.
La prière et le culte arrivent à la fin de ce récit, pour rendre gloire à Dieu pour ce qu’il a fait. La question n’était pas, n’est jamais de convaincre Dieu de nous vouloir du bien.
La première piste qui nous est donnée ici pour nous débrouiller en l’absence du Christ est de nous assembler à deux ou trois dans un mouvement pour faire place à Dieu dans notre vie.
La seconde piste est de mobiliser en nous-même notre Pierre et notre Jean, notre énergie et notre spiritualité, les mettre en route ensemble vers la prière. Notre être s’élève alors, s’unifie.
Et nous arrivons, comme le dit le texte, à « la Belle Porte » de notre vie. C’est là que nous avons rendez vous avec l’événement du salut donné et reçu.
À cette belle porte, un homme est là, qui mendie pour vivre. C’est une forme de prière aussi. L’histoire nous propose de nous identifier aussi à cet homme, pas seulement à Pierre et Jean. Pour pouvoir donner, il nous faut d’abord avoir reçu.
Cet homme attend peu de chose, mais il attend quelque chose. C’est déjà essentiel. Il est un peu comme les apôtres à la disparition de Jésus, ils attendaient que Dieu fasse le travail puis leur donne l’aumône d’une vie meilleure. Au lieu de cela, les disciples recevront d’être eux-mêmes source de vie meilleure. C’est la même révolution dont va bénéficier cet homme.
L’homme est décrit comme s’il était un bébé qui vient de naître et qui ne peut pas encore marcher, ce qui n’est bien entendu pas la faute du bébé, seulement : nous ne sommes pas fait pour rester à ce stade.
Au milieu de l’histoire il y a cette parole de Pierre qui lui dit « Lève-toi et marche » ce qui peut se traduire du grec tout aussi bien par : « ressuscite et avance ». C’est le programme : que nous ressuscitions maintenant, que nous soyons animé d’une vie plus vivante, joyeuse et libre, bondissante, au moins par le cœur et par l’esprit.
Comme Pierre et Jean, l’homme a une minuscule amorce de prière : celle d’avoir de quoi vivre une journée, c’est déjà un début, peut-être est-ce même la prière essentielle de vouloir bien vivre au moins le jour présent, comme dans la prière enseignée par Jésus où nous demandons notre pain pour ce jour seulement. Vouloir vivre ce jour, c’est déjà aimer la vie.
Comme exaucement à cette espérance, Pierre accompagné de Jean dit à l’homme « regarde nous ». C’est la première chose qu’il lui donne à faire avant le « lève toi et marche (ressuscite et avance) ». Regarder Pierre et Jean, c’est se décentrer de soi-même et entrer dans un «là où deux où trois sont réunis », comme le dit Jésus (Matthieu 18:20). C’est intégrer l’humanité, pour cela, regarder seulement une seule personne suffirait déjà. Ici, l’homme est appelé à regarder non pas Pierre seulement mais Pierre et Jean : c’est prendre en compte ces deux dimensions de l’humain, celle de l’énergie et celle de l’intériorité, c’est ce qui aide à ressusciter et à avancer.
Pierre dit ensuite que ce qu’il lui offre c’est «le nom de Jésus Christ » à ajouter au « là où deux ou trois sont réunis ». C’est ajouter une dimension de verticalité à une attente qui n’était qu’horizontale, que terre à terre.
L’homme est alors prêt à vivre ce « ressuscite et avance ». Ce n’est pas une parole magique forçant Dieu à faire un miracle. Cette parole de Pierre lui dit que le projet du Christ est de lui donner, à lui aussi, une vie élevée, que c’est le projet de Dieu depuis toujours. Cela prépare l’homme à se réconcilier avec Dieu. Pierre accompagne cet Évangile d’un geste très concret, à niveau d’homme, avec sa main qui l’aide à se lever. Pierre et Jean sont ainsi associés dans ce geste et dans cette parole, à la fois en force et en tendresse, en énergie et en intériorité, à la fois humaine et divine.
Cette rencontre à la belle porte augmente la vie de l’homme, mais aussi celle de Pierre et de Jean qui prendront alors courage pour adopter la poursuite du ministère du Christ sur cette terre.
Notre monde a plus que jamais besoin de ce genre de résurrection et d’avancée.
Avec cela nous ferons des miracles.
Que Dieu nous soit en aide.
Amen.
Pour débattre sur cette proposition : c'est sur le blog.
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Pierre et Jean montaient ensemble au temple, à la neuvième heure, pour la prière.
2 Il y avait un homme boiteux de naissance, qu’on portait et qu’on plaçait tous les jours à la porte du temple appelée la Belle, pour qu’il demande l’aumône à ceux qui entraient dans le temple.
3 Cet homme, voyant Pierre et Jean qui allaient y entrer, leur demanda de recevoir une aumône.
4 Pierre, accompagné de Jean, fixa les yeux sur lui, et dit : Regarde-nous. 5 Et il les fixait, s’attendant à recevoir d’eux quelque chose.
6 Pierre lui dit: Je n’ai ni argent, ni or, ce que j’ai, je te le donne: au nom de Jésus-Christ de Nazareth, lève-toi et marche. 7 Et le prenant par la main droite, il le leva. À cet instant, ses pieds et ses chevilles furent affermis, 8 et d’un saut il fut debout et il marchait. Il entra avec eux dans le temple, marchant, sautant, et célébrant Dieu.
9 Tout le monde le vit marchant et célébrant Dieu. 10 Ils reconnaissaient que c’était celui qui était assis à la Belle Porte du temple pour demander l’aumône, et ils furent remplis d’étonnement et de surprise sur ce qui lui était arrivé. 11 Comme l’homme s’agrippait à Pierre et Jean, tout le peuple étonné accourut vers eux, au portique dit de Salomon.
12 À cette vue, Pierre répondit au peuple : « Hommes israélites, pourquoi vous étonnez vous de cela ? ou pourquoi nous fixer du regard, nous, comme si c’était par notre propre puissance ou par piété que nous l’avions fait marcher ?