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Noël selon Paul et Luc :
«jusqu'à ce que Christ soit formé en nous»

(Luc 1:28-38 ; Galates 4:4-19)

(écouter, imprimer la feuille)

Matin de Noël, 25 décembre 2023
Culte au temple de Cologny
prédication du pasteur Marc Pernot

Le Nouveau Testament est formé de 27 textes écrits au Ier siècle de notre ère pour évoquer Jésus-Christ. Parmi ces textes, il n’y a que les évangiles de Matthieu et de Luc qui parlent de l’enfance de Jésus, et seulement Luc qui parle de Jésus comme conçu miraculeusement par le Saint Esprit en Marie.

Les textes de l’apôtre Paul sont parmi les plus anciens. Dans sa lettre aux Galates, il parle de la naissance de Jésus en disant qu’il est « né d’une femme », γυνή (gunè en grec) et non d’une jeune fille (παρθένος, parthénos en grec). Il dit par contre que c’est en nous-mêmes que l’enfant de Dieu est en train d’être formé. C’est nous toutes et nous tous qui sommes enceints du Christ par la vertu du Saint-Esprit. C’est effectivement une magnifique nouvelle : notre test de grossesse est positif, nous sommes porteur de vie. Et quelle vie !

Luc nous rapporte donc une histoire apparemment féérique sur la conception de Jésus. Paul parle d’une naissance normale de Jésus et c’est nous qui vivons, dans les profondeurs de notre être, une histoire dépassant l’ordinaire. Est-ce qu’il y aurait là un sujet de dispute entre Luc et Paul, comme il en existe dans les familles autour de la dinde de Noël ? Certainement pas : car Luc était un ami très proche de Paul et tout appris de lui. Paul écrit cette lettre en 50, Luc a certainement eu connaissance de ce texte rédigé par son maître et il écrit son évangile quelque chose comme 25 ans après.

On peut donc avancer que si nous avons une différence entre le récit de Luc et l’enseignement de Paul, c’est plus une différence de styles littéraires, avec des significations proches, chacun dans son style.

L’avantage et l’inconvénient de la façon dont Paul s’exprime est son côté très philosophique et théologique. C’est formateur, mais tout le monde n’est pas prêt à cet effort, et cela pourrait rester très cérébral.

L’avantage et l’inconvénient de la façon dont parle son disciple Luc est le côté féérique de son enseignement : avec l’histoire d’une jeune fille, des anges, des miracles, des bergers et des chants dans le ciel... cela est vivant et joyeux, mais bien des personnes peuvent prendre cela comme étant un conte à dormir debout.

Alors qu’évidemment non : les deux façons de parler nous apportent profondément. À condition de lire ces textes selon l’Esprit, c’est à dire en nous impliquant personnellement dans ces textes comme des récits de formation, littéralement : de formation du Christ en nous, comme le dit ici Paul. Formation de cette dimension nouvelle dans notre façon d’être et de vivre, d’espérer et de faire confiance à Dieu.

Dans cet enseignement hyper concentré de l’apôtre Paul, chaque ligne est une grande nouvelle pour nous :

1) Humain, nous sommes adopté comme divin

« Dieu a envoyé son Fils, né d’une femme et né sous la Loi religieuse, pour affranchir ceux qui sont sous cette loi, et pour que nous recevions d’être enfant adoptifs. »

Nous avons là deux choses : Jésus est né avec un corps de chair comme nous, et il est né avec une religion, ses règles et ses rites. Paul nous dit qu’en Christ ces deux choses sont transformées radicalement.

Comme lui nous sommes nés et nous n’avons pas cherché à l’être. Nous sommes le fruit d’une histoire de milliards d’années avec l’apparition de la vie, l’évolution des espèces, des hasards et des rencontres... et plop : nous sommes arrivés à la vie. Serions-nous seulement comme un peu d’écume à la surface d’une vague de l’océan ? Non : en Christ nous apprenons que nous sommes personnellement adopté par Dieu somme son enfant. L’idée même d’adoption rompt avec les hasards de l’existence : une volonté, une décision, un choix, un amour qui nous reconnaît comme essentiel.

Ensuite, cela rompt avec la religion, nous dit Paul. Comment ? Depuis que l’humanité existe, les hommes cherchent Dieu et développent pour cela des religions, des rites, des mythes, des théologies, des prières afin d’obtenir les faveurs de Dieu ou des dieux, du destin ou du karma... En Christ, nous voyons que c’est l’inverse : nous sommes connus et reconnus avant même que nous cherchions Dieu. Cela change complètement notre rapport à Dieu et le sens de la religion.

C’est un préalable absolument génial. Nous pouvons être nous-même, et nous pouvons chercher Dieu le cœur ouvert. Prier est alors une gourmandise, une respiration, ce n’est plus un devoir.

-Pour vivre ce 1 er point : réjouissons-nous d’être nous-même, et pour cela, mettons-nous à l’écoute de l’Esprit qui souffle au fond de nous : Dieu voit en nous son enfant qu’il aime.

2) En relation cœur à cœur avec Dieu

« Parce que vous êtes ses enfants : Dieu a envoyé dans nos cœurs l’Esprit de son Fils, qui crie : Abba – Père ! »

Quand un enfant est né ou qu’il est adopté, la question reste ouverte : l’enfant adoptera-t-il ses parents ? C’est l’espérance de Dieu, évidemment. Nous savons que notre réponse est libre car il est manifestement possible de vivre en tournant le dos à Dieu : il n’a jamais foudroyé personne, il n’a ni puni ni abandonné personne, pas même ses ennemis, nous dit Jésus. Dieu nous laisse libre mais il nous appelle : depuis que nous ne sommes plus seulement une sorte de cousin du singe, l’humain a reçu le don de s’ouvrir à la spiritualité, pas seulement de chercher à manger et à se reproduire.

En Christ, cette spiritualité devient une intimité cœur à cœur avec Dieu, une relation de seule tendresse, appelant Dieu non pas « Seigneur » comme dans certaines traditions, mais « Abba - Père», « papa » en hébreu.

-Pour vivre ce 2 e point : nous pourrions ouvrir chacune de nos prières et nous plaçant devant Dieu comme étant de toute tendresse, de seule tendresse envers nous, envers ce monde. Rester là dessus le temps que cela infuse en nous.

3) D’employé nous devenons héritier

« Tu n’es donc plus esclave, mais enfant ; et, comme enfant, tu es aussi héritier par Dieu. »

C’est en même temps libérant, et c’est en même temps responsabilisant, c’est là que les affaires sérieuses commencent. Nous ne travaillons pas pour un salaire sous les ordres d’un patron nous dit Paul.

Imaginons que nous sommes à la tête de l’entreprise créée par notre ancêtre en 1340 et que chaque génération depuis a fait vivre, a adaptée, transmise aux générations suivantes... C’est notre tour, qu’aimerions-nous faire ? Nous sommes libre (voir Luc 15:11...).

En tout cas, l’Esprit nous est donné, et l’Esprit c’est le pouvoir de créer, d’innover, d’entreprendre, de construire avec d’autres.

-Pour vivre ce 3 e point : vivons par l’Esprit, osons discerner les besoins et nos talents, osons avoir de l’idéal, osons choisir des engagements personnels, aussi modestes soient-ils, ce sera déjà cela.

Paul poursuit :

4) La connaissance de Dieu nous rend libre

« Jadis, quand vous ne connaissiez pas Dieu, vous étiez asservis à des dieux qui, par nature, ne le sont pas, mais maintenant : vous connaissez Dieu, ou plutôt vous êtes connus de lui. »

Alors que la peur de Dieu faisait de nous un esclave de la religion. Alors que l’absence de Dieu nous faisait croire en l’homme seulement. Christ nous a vraiment fait découvrir que Dieu nous élève, nous rend meilleur. C’est libérant et encourageant.

Seulement, Paul nous fait remarquer qu’il existe une autre chose qui nous rend esclave : c’est l’ignorance.

C’est pourquoi les tyrans de toutes sortes cherchent à empêcher les gens d’apprendre et donc de pouvoir penser par eux-mêmes.

Celui qui n’a aucune idée de Dieu risque d’avoir plein de dieux de substitution, et ces dieux sont tyranniques.

En Christ, la connaissance de Dieu nous rend libre : la connaissance de son amour, c’est vrai, et aussi le fait que Jésus passe son temps à stimuler notre propre questionnement sur Dieu, à casser les idées simplistes.

-Pour vivre ce 4 e point : pensons et prions librement, creusons, posons-nous des questions, débattons avec les autres avec respect et intérêt.

5) C’est avec patience que Dieu nous forme

Finalement, Paul supplie les Galates en les appelant : « mes petits enfants que, dans la douleur, j’enfante encore et encore, jusqu’à ce que Christ soit formé en vous. »

L’opération Noël n’est donc pas terminée, ni en nous, ni dans le monde. Nous sommes à l’image de Marie enceinte. Nous sommes dans cet entre-deux : il existe déjà quelque chose de génial dans l’humanité et en chacun de nous. Et c’est vrai que nous avons la douleur aussi de constater que nous sommes loin du compte.

Nous sommes en travail avec Dieu, il est patient parce qu’il aime.

Cet embryon de Christ est bien là, vivant, en cours de formation dans nos profondeurs. Dieu nous bénit et nous accompagne. Et c’est donc en confiance et dans la louange à Dieu que nous pouvons vivre un Joyeux Noël, fêtant ce qui nous est déjà donné. Et ce qui nous est promis.

Pour débattre sur cette proposition : c'est sur le blog.

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Textes Bibliques

Évangile selon Luc 1:28-38

28L’ange entra auprès de Marie et lui dit : « Sois joyeuse, toi qui as la faveur de Dieu, le Seigneur est avec toi. » 29A ces mots, elle fut très troublée, et elle se demandait ce que pouvait signifier cette salutation. 30L’ange lui dit : « Sois sans crainte, Marie, car tu as trouvé grâce auprès de Dieu. 31Voici que tu vas être enceinte, tu enfanteras un fils et tu lui donneras le nom de Jésus. 32 Il sera grand et sera appelé Fils du Très-Haut. Le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père ; 33il régnera pour toujours sur la famille de Jacob, et son règne n’aura pas de fin. »

34Marie dit à l’ange : « Comment cela se fera-t-il puisque je ne connais pas d’homme ? » 35L’ange lui répondit : « L’Esprit Saint viendra sur toi et la puissance du Très-Haut te couvrira de son ombre ; c’est pourquoi celui qui va naître sera saint et sera appelé Fils de Dieu. 36Et voici que Elisabeth, ta parente, est elle aussi enceinte d’un fils dans sa vieillesse et elle en est à son sixième mois, elle qu’on appelait la stérile, 37car avec Dieu, aucune parole n’est impossible. » 38Marie dit alors : « Je suis la servante du Seigneur. Que tout se passe pour moi comme tu me l’as dit ! » Et l’ange s’éloigna.

Galates 4:4-19

4Quand est venu l’accomplissement du temps, Dieu a envoyé son Fils, né d’une femme et né sous la loi, 5pour affranchir ceux qui sont sous la loi, pour que nous recevions d’être enfants adoptifs.

6Parce que vous êtes ses enfants : Dieu a envoyé dans nos cœurs l’Esprit de son Fils, qui crie : Abba – Père ! 7Tu n’es donc plus esclave, mais enfant ; et, comme enfant, tu es aussi héritier par Dieu.

8Jadis, quand vous ne connaissiez pas Dieu, vous étiez asservis à des dieux qui, par nature, ne le sont pas, 9mais maintenant que vous connaissez Dieu, ou plutôt que vous êtes connus de lui, comment pouvez-vous retourner encore à des éléments faibles et pauvres, dans la volonté de vous y asservir de nouveau ? 10Vous observez religieusement les jours, les mois, les saisons, les années ! 11Vous me faites craindre d’avoir travaillé pour vous en pure perte !... 19Vous, mes petits enfants que, dans la douleur, j’enfante encore et encore, jusqu’à ce que Christ soit formé en vous.