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Le dimanche 12 février 2023
culte eu temple de Vandœuvres
prédication du pasteur Marc Pernot
Paul vit un grand tremblement de terre, cela rejoint l’actualité de la catastrophe qui a eu lieu cette semaine en Anatolie, avec plusieurs dizaines de milliers de morts. À chaque catastrophe naturelle, qu’elle soit à l’échelle de la planète ou dans notre vie personnelle, il nous arrive d’être interrogé : pourquoi Dieu a-t-il fait ça ? Ou pourquoi n’a-t-il pas empêché ce gâchis ? Comme le dit le Psaume : « où est-il ton Dieu ? » (Psaume 42:4)
Quand les horreurs viennent manifestement de bêtises ou de folie humaines, certains évoquent alors la liberté que Dieu donne aux humains. Certes, mais alors pourquoi Dieu ne met-il pas quelques bornes à cette liberté ? Et pour les catastrophes naturelles ?
Il existe de multiples réponses à cette question. La meilleure, à mon avis, c’est que Dieu n’a pas pu empêcher cela. Dieu est certes puissant, il n’y a qu’à regarder tout ce qu’il y a de merveilleux dans l’évolution de l’univers. Mais il n’est pas « tout puissant », il n’y a qu’à regarder les catastrophes qui existent. Nous sommes dans une création en cours, il reste quelque chose du chaos originel dans la nature et en nous. Dieu y travaille à sa façon et à son rythme, à l’échelle des milliards d’années, et il nous embauche, nous, à participer à cette grande œuvre, à notre niveau (Jean 9 :4).
Bien d’autres explications existent mais sont souvent épouvantables : Dieu testerait ou punirait (ce Dieu là serait un monstre, torturant à mort ses enfants !). Ou alors ce seraient Adam et Ève qui auraient gâché l’harmonie parfaite de la création avec leur « péché originel » (n’exagérons pas, le récit de la Genèse ne rapporte qu’une gourmandise d’enfant, et cela n’a rien à voir avec la tectonique des plaques qui existait bien avant que l’humain existe). La pire des « explications » serait que Dieu fait le bien et qu’il ferait aussi le mal pour une raison qui lui appartient (ce Dieu là n’aurait rien à voir avec l’Amour manifesté en Christ car on ne fait pas de mal à l’être aimé, sauf folie furieuse).
Au contraire : nous avons confiance en Dieu car il est la source profonde de vie et de bien, toujours, partout, en toute circonstance. Comme le dit Jean : ce que nous avons appris de Jésus-Christ c’est que «Dieu est lumière, et qu’il n’y a point en lui de ténèbres. » (1 Jean 1:5). Ce n’est donc pas malgré les catastrophes que nous croyons en Dieu, au contraire : nous croyons en Dieu, nous avons confiance en lui et nous voulons nous associer à lui, parce qu’il est la source puissante qui agit et qui nous mobilise pour augmenter la vie partout et toujours.
Paul subit donc un tremblement de terre dans la ville de Philippes en Macédoine. C’est très plausible historiquement et Luc, qui écrit ce livre des Actes des apôtres, était sur place.
Comment est-ce que Paul comprend ce tremblement de terre ? Pas comme venant de Dieu, en tout cas, car s’il avait pensé une seconde que Dieu lui ainsi ouvert les portes de la prison, il aurait emprunté ces portes, comme Pierre le fait dans un autre épisode (Actes 12). Mais non. Quand Paul sera libéré ce ne sera pas grâce à ce séisme, les magistrats décident simplement de l’expulser de la ville.
Pourquoi alors est-ce que Luc nous parle de ce tremblement de terre ? Il est possible que ce soit un souvenir personnel important pour lui, qu’il associe dans sa mémoire à une autre séisme de sa vie : à ce moment là, il vient de se convertir à l’Évangile, il a quitté sa vie de médecin à Antioche (d’après certains auteurs anciens) et ce voyage en Macédoine avec Paul est le début de sa vie nouvelle. Luc utilise ce souvenir de tremblement de terre pour dire ce que lui a apporté sa conversion à l’Évangile.
En tout cas, bien des éléments de ce texte de Luc renvoient à notre vie intérieure :
À commencer par ce surprenant lieu où le geôlier enferme Paul et Silas : «la prison intérieure »(24), avec ce mot « intérieur » (ἐσώτερος) qui est utilisé dans la Bible pour parler du « saint des saints » du temple de Jérusalem, derrière le voile. Il y a aussi cette allusion aux « fondations ébranlées » nous renvoyant encore vers les profondeurs de l’être, et la « demande de lumière » du geôlier, puis sa recherche « de qu’il faut faire pour être sauvé », cela nous invite à lire ce récit comme un tremblement de terre intérieur, un changement radical de perspective.
Ce tremblement de terre probablement historique n’a pas d’importance dans l’itinéraire de Paul, par contre les détails incrustés dans le récit attirent notre attention sur le cheminement intérieur du geôlier qui devient le personnage principal auquel nous sommes appelés à nous identifier, et nous convertir avec lui. Ou plutôt pour être converti par Dieu, car là aussi un détail apparemment superflu a été inséré par Luc : le « subitement » du tremblement de terre (ἄφνω) est un adverbe utilisé dans la Bible pour parler de l’action subite de Dieu afin de renverser une mauvaise situation. Cet adverbe n’est utilisé par Luc que deux fois : ici, dans la prison intérieure du geôlier, et dans son récit de la Pentecôte quand « subitement vint du ciel un bruit comme celui d’un vent impétueux, il remplit toute la maison où ils étaient »(Actes 2:2) et « ils furent remplis du Saint Esprit ».
Que réalise le « subitement » du souffle de Dieu pour le geôlier ? Les fondations de sa prison intérieure sont ébranlées, toutes les portes s’ouvrent, toutes les chaînes se détachent, et le geôlier est tiré de son endormissement.
Tout nous dit un grand souffle de liberté et d’éveil. Pourtant, le geôlier se sent d’abord perdu, il se dit que tous ceux qu’il retenait précieusement enfermés se seront enfuis, il se croit au bout de sa vie. Et puis, non : ils sont tous là et ce sera au contraire le début de sa vie.
Au sens physique il est invraisemblable qu’un tremblement de terre ouvre délicatement toutes les portes, détache avec encore plus de délicatesse toutes les chaînes, et que pas un seul des prisonniers n’en profite pour s’enfuir. Mais au sens spirituel ce récit tient la route et est passionnant.
L’humain a une aspiration profonde à détenir des certitudes, comme le saint des saints du temple pour la présence de Dieu. Cela peut se manifester pour certaines personnes dans des dogmes ou des rites religieux, cela peut s’incarner dans des certitudes scientifiques, ou des idéologies. C’est une aspiration à posséder un appui solide et stable. C’est en réaction, je pense, à une peur, à un pessimisme, à une fatigue, à des déceptions et à la crainte de nouvelles déceptions. L’homme a l’impression que tout tremble et vacille autour de lui, c’est le cas aujourd’hui et cela a toujours été le cas. Alors, dès que nous avons trouvé un petit quelque chose, nous avons tendance à en faire une de nos certitudes que nous enfermons comme dans une prison intérieure, nous leur attachons les pieds pour que surtout elles ne fassent pas de chemin. Même quand c’est notre foi que nous enchaînons ainsi au fond de notre être, ce n’est plus l’Évangile, c’est alors un « Dysangile » nous dit Frédéric Nietsche (L’antéchrist) qui s’y connait. La certitude crucifie tout élan de création, toute recherche, tout souffle.
Quand les fondations de sa prison intérieure sont ébranlées, quand il sent que les portes sont ouvertes, le geôlier croit sa vie finie : il est persuadé que toutes les certitudes auxquelles il tenait plus qu’à sa vie se seront enfuies. Au contraire, ce sera pour lui comme un éveil. Il va pouvoir faire sortir et même monter ceux qu’il enfermait dans sa prison intérieure, les nourrir, les laisser poursuivre leur chemin et ce sera source de joie pour lui et pour son entourage.
Les évangiles racontent qu’à la mort du Christ le voile du temple se déchira, ouvrant le saint du saint sur le monde entier, que la terre trembla et les rochers se fendirent, laissant vivre ceux qui y étaient enfermés. De même qu’ici les fondations du temple de nos certitudes sont ébranlées, les portes et les chaînes s’ouvrent, notre geôlier s’éveille et il cherche, enfin, la lumière et le salut. Il ose chercher, c’est la vie qui s’ouvre, et pourtant c’est d’abord un vertige qui le saisit devant ses fondations ébranlées : sa vie a-t-elle encore un sens ? Comment trouvera-t-il la lumière sans ses certitudes ? J’ai connu bien des croyants qui connaissent ce vertige quand leur foi s’ouvre enfin, quand leurs fondations de dogmes sont ébranlées. Comme le geôlier ils se disent « donnez moi de la lumière » et « comment serais-je sauvé ? » Par la foi (la recherche confiante de Dieu). Son souffle ouvre les portes et brise les entraves, son Christ est cheminement de vie. Rapidement, ces croyants sortant d’un système fondé sur des certitudes pour une foi ouverte, ressentent un véritable bienfait, comme cet ancien geôlier.
« Ce n’est pas le doute, c’est la certitude qui rend fou… Mais on doit être profond pour sentir de la sorte » nous dit Nietzsche (Ecce Homo §4). Il faut avoir eu la grâce de cet ébranlement des fondations de notre forteresse intérieure, ouvrant nos portes, faisant tomber nos chaînes, nous éveillant, pour sentir que la vie est là.
Ce chemin de conversion commence par Paul, il figure cette part de nous-même qui porte l’Évangile du Christ et qui prie au fond de nous. Sa prière est une louange, nous dit Luc. C’est une méditation sur ce que Dieu nous a déjà apporté, et ce n’est qu’une louange, car Dieu nous a toujours fait du bien et soutenu. C’est là le point fondamental. Nous n’oserons lâcher notre système de certitudes que si et seulement si nous avons comme théologie celle de Dieu qui est source de vie et uniquement source de vie. Dieu en qui nous pouvons avoir confiance. Non pas Dieu de la crainte, mais Dieu des louanges. Comme dans le récit de Luc, toutes les autres dimensions de notre être intérieur écoutent cette louange.
La seconde étape vient, d’une façon qui nous est inconnue, subite comme ici ou parfois plus diffuse, elle vient comme un souffle qui ouvre les portes de notre être sur la vie. Et notre âme, au lieu d’être le geôlier de nos certitudes, s’éveille, elle s’ouvre à une recherche et à une confiance en celui qui est toujours en train de créer la vie. Notre foi, nos convictions peuvent sortir, peuvent monter, peuvent s’interroger, nous pouvons les nourrir.
Dieu n’est jamais derrière les tremblements de terre, il est source de tremblement de nos prisons intérieures pour nous faire vivre et nous réjouir.
Pour débattre sur cette proposition : c'est sur le blog.
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Ils se saisirent de Paul et de Silas, et les traînèrent sur la place publique devant les magistrats. 20 Ils les présentèrent aux stratèges, en disant: Ces hommes troublent notre ville, étant Juifs, 21ils annoncent des coutumes qu’il ne nous est permis ni de recevoir ni de pratiquer aux Romains. 22La foule se souleva contre eux, et les stratèges, ayant fait arracher leurs vêtements, ordonnèrent qu’on les roue de coups de bâton. 23Après les avoir affligé de multiples de coups, ils les jetèrent en prison, en recommandant au geôlier de les garder en sureté.
24 Le geôlier, ayant reçu cet ordre, les jeta dans la prison intérieure, et les attacha leurs pieds au bois. 25Vers le milieu de la nuit, Paul et Silas priaient en chantant les louanges de Dieu et les prisonniers les écoutaient. 26Subitement il y eut un méga tremblement de terre, en sorte que les fondations de la prison furent ébranlées, aussitôt, toutes les portes s’ouvrirent et tous les liens se détachèrent. 27Le geôlier sortit du sommeil, et, voyant que les portes de la prison avaient été ouvertes, il tira son épée et allait se tuer, pensant que les prisonniers s’étaient enfuis. 28Mais Paul cria d’une voix forte : Ne te fais pas de mal car nous sommes tous ici. 29 Alors le geôlier, ayant demandé de la lumière, entra précipitamment, et se jeta tout tremblant aux pieds de Paul et de Silas, 30il les fit sortir, et dit : Seigneurs, que me faut-il faire pour être sauvé ? 31Paul et Silas répondirent : Aies foi au Seigneur Jésus, et tu seras sauvé, toi et ta famille. 32Et ils lui annoncèrent la parole du Seigneur, ainsi qu’à tous ceux qui étaient dans sa maison. 33Il les prit avec lui, à cette heure même de la nuit, il lava leurs plaies, et aussitôt il fut baptisé, lui et tous les siens. 34Les faisant monter dans son logement, il leur servit à manger, et il se réjouit avec toute sa famille de ce qu’il avait eu foi en Dieu.
Les fondations de la terre sont secouées.
La terre vole en éclats,
la terre craque, se craquelle,
la terre tremble, vacille,
la terre titube comme un ivrogne,
elle est balancée comme une cahute
son péché lui pèse tant qu’elle tombe sans pouvoir se relever.
Quand les montagnes s'ébranleraient,
Quand les collines chancelleraient,
Ma bienveillance pour toi ne sera pas ébranlée,
Et mon alliance de paix ne chancellera pas,
Dit l'Éternel, qui a compassion de toi.