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Le Royaume des cieux est...

(Matthieu 4:17, 23 ; Matthieu 5:1-3 ; Matthieu 13:44-46)

(écouter l'enregistrement - voir la vidéo ci-dessous)

Culte du dimanche 14 février 2016
prédication du pasteur Marc Pernot

Texte de la prédication (vidéo ci-dessous)

Les premiers mots de Jésus dans l’Évangile selon Matthieu est d’annoncer que « le Royaume de Dieu s’est approché », s’est déjà approché (Jésus parle au passé). (Mt 4:17 ; 23)

Au chapitre suivant Jésus dit que « le Royaume des cieux est à eux » au présent. L’Évangile se précise. Ce n’est pas une promesse pour dans mil ans, ni pour demain, mais au présent. (Mt 5:1-3)

Alors qu’est-ce que le Royaume des cieux ?

Jésus nous explique un peu ce que c’est que ce « Royaume des cieux » si important pour lui. (Mat 13:44-46)

Bien des personnes pensent que le Royaume des cieux est le Paradis, l’endroit où vont ceux qui ont de la chance après la mort. Dans l’Evangile, ce n’est pourtant pas cela. En effet, nous l’avons entendu, Jésus ne parle pas du Royaume des cieux comme un lieu, et il en parle comme si nous pouvions avoir le Royaume des cieux maintenant, alors que nous sommes sur terre.

Il nous faut donc oublier tout ce que la foule pense qu’est le « Royaume de Dieu » pour découvrir ce dont Jésus parle et qui constitue cette bonne nouvelle, cet Évangile qu’il nous adresse, pour que nous ayons une vie belle & joyeuse sur cette terre. Pour commencer.

Jésus nous explique ce qu’est « le Royaume des cieux ». Il en parle d’une façon un peu curieuse et amusante, sous forme de petits contes. Il ne nous en parle jamais autrement, c’est quand même curieux pour quelque chose de si essentiel pour lui. Mais c’est révélateur. Jésus ne nous communique pas un savoir sur le Royaume de Dieu, mais il nous le donne à ressentir et à penser. À ressentir car quand il nous fait imaginer cet ouvrier paysan qui trouve un trésor en faisant son dur travail, on peut ressentir la joie de cet homme dont la vie va être transformée. C’est cette joie et cette nouvelle vie que Jésus associe à cette notion de Royaume. Il veut nous faire ressentir un peu cela, espérer, attendre cela à travers ces petits contes. Et Jésus nous donne aussi à penser, à nous creuser la tête. Car il y a toujours quelque chose de surprenant dans ces petits contes qu’il nous donne, quelque chose qui nous semble pas logique. Que cherche à faire Jésus ainsi ? Pas seulement à nous faire rêver, mais à réveiller notre intelligence, et nous donner ainsi la chance d’avoir un regard neuf.

Selon Jésus, le Royaume de Dieu est donc semblable à une petite histoire. Qu’est-ce qui arrive ?

  1. Tout commence de façon tout ordinaire : un paysan dans son champ, un commerçant qui cherche de la bonne marchandise.
  2. Il y a ensuite une surprise, quelque chose d’extraordinaire survient, un trésor est trouvé, ou une perle absolument géniale.
  3. Jusque là, même s’il y a une surprise, il n’y a rien d’illogique. Par contre, la troisième partie de ces histoires qu’invente Jésus sont tout à fait étranges, surréalistes. Le paysan semble ne pas s’intéresser au trésor qu’il a trouvé, et le marchand choisit de perdre son commerce.

Une vie normale

Cette structure de ces deux petits contes donnés par Jésus nous donne des pistes pour connaître ce « Royaume des cieux ». Nous avons une vie normale, comme ce paysan et ce commerçant que Jésus nous donne à imaginer. La variété de leurs situations suggère que la bonne surprise de la découverte du trésor est faite pour arriver à tout le monde, et donc à nous aussi.

Un trésor avait été caché dans le champ, nous dit Jésus. Dans la Bible, quand il y a un verbe au passif dont le sujet n’est pas indiqué, comme ici, cela sous entend que c’est Dieu, qui en a été l’auteur. Dieu a donc caché un extraordinaire trésor dans notre existence. Nous avons les pieds dessus et au début, nous ne le voyons pas, nous ne le connaissons pas. Mais il est là. Notre vie et notre personne nous semblent ordinaires, comme la poussière du sol, mais il y a aussi quelque chose d’inestimable dans ce champ. Le paysan et le commerçant ne font rien de spécial pour trouver ce trésor, ils vivent leur vie tranquillement. Jésus ne nous donne donc pas des choses extraordinaires à faire pour gagner le Royaume, gagner le salut, il n’y a pas des « il faut croire ceci, il faut faire cela », ni des rites, ni des sacrifices. Mais juste à vivre, être soi-même, le paysan travaillant sa terre, le commerçant cherchant sa marchandise, le boulanger pétrissant son pain, le berger gardant ses brebis, le médecin soignant ses malades, le pauvre mendiant son pain... chacun là où les hasards de l’existence et ses choix personnels l’ont conduit.

Une surprise nous est réservée

Par contre, ce que les héros de ces deux histoires de Jésus font de bien, c’est de se laisser surprendre et émerveiller quand elles rencontrent le trésor caché. Le paysan aurait pu ne pas faire attention quand sa fourche a fait apparaître cette vieille casserole, il aurait pu la jeter sur le tas de pierre du bord du champ sans l’ouvrir. Le marchand de perle aurait pu se dire : bah, une perle cent fois plus grosse et plus belle que toute les perles que j’ai vues depuis que je suis marchand de perles, ça n’existe pas, elle doit être fausse. Non, les personnes des petits contes de Jésus se laissent surprendre par le trésor, elles le trouvent, elles sautent de joie, elles en tiennent compte. Tant de personnes passent à côté de leur trésor et restent dans une vie qu’ils pensent être ordinaire alors qu’elle est faite pour être un vrai conte de fées, selon Jésus. Tant de personnes passent à côté d’immenses bénédictions, passent à côté de ce trésor qu’est la foi, du trésor qu’est la connaissance de l’amour de Dieu, ou passent à côté du trésor qu’est la joie d’aimer le vie et les personnes que l’on croise, la joie de faire un peu de bien...

« Le royaume des cieux est semblable
à un trésor caché dans le champ,
qu’une personne a trouvé »

Pour l’instant, on pense que le Royaume des cieux est le trésor, et que Jésus nous dit qu’il faut tout quitter pour vivre de ce trésor qu’est la foi en Dieu.

Et c’est là que Jésus nous surprend. Encore une fois.

Si vous trouviez un trésor dans un champ, par exemple en creusant un trou pour planter des patates. Qu’est-ce que vous feriez ? Qu’est-ce que 99,99999% des gens feraient ? Ils sauteraient en l’air de joie et partiraient avec le trésor vivre comme bon leur chante. Dans l’histoire de Jésus, pas du tout, bien au contraire. La personne qui a trouvé le trésor le remet en terre et va acheter le champ.

Quelle drôle d’idée ! Quel sens est-ce que cela peut avoir ? C’est ainsi que Jésus nous parle du Royaume des cieux. Et c’est si surprenant que bien des commentaires de ce passage préfèrent ne pas lire ce qui est vraiment marqué et interprètent cette parabole comme si la personne qui avait trouvé le trésor laissait le champ du monde et partait avec le trésor de la foi. Mais non.

Nous pensions que Jésus disait que le Royaume des cieux était comme un trésor, on peut effectivement comprendre les premiers mots comme cela. Mais quand on voit la suite de ce petit conte, ce n’est pas possible. Le Royaume de Dieu n’est pas comme un trésor. Le Royaume de Dieu est comme une histoire de vie ordinaire qui devient extraordinaire. Le Royaume des cieux n’est pas un lieu, ce n’est pas un objet, mais c’est comme une histoire où un homme a une joie intense, s’enthousiasme, se met à voir la vie tout autrement, et se met à agir en conséquence...

Alors pourquoi est-ce que le paysan de cette histoire de Jésus mise tout sur le champ qui contient le trésor plutôt que de partir avec le trésor ?

C’est que le champ dont parle ici Jésus évoque notre vie, notre être et notre existence en ce monde. Le champ évoque notre prochain qui nous est confié. Et ce trésor qu’est d’avoir trouvé Dieu, ce trésor fait aimer la vie, il fait aimer ce monde que Dieu aime, il nous fait découvrir sa beauté. L’expérience de la rencontre avec Dieu ne donne pas envie de quitter le monde mais de l’aimer.

Et c’est cela, le Royaume de Dieu : c’est quand Dieu arrive à nous faire aimer la vie. Alors, comme ce paysan, on aime le champ, et on aime que ce trésor soit là en plein cœur du champ. Le théologien Paul Tillich parle ainsi de la foi comme la découverte de la profondeur de l’existence. Cette dimension de la verticalité est en effet évoquée ici à la fois dans l’expérience du trésor enfoui et dans le fait que le Royaume est appelé « des cieux ».

Le trésor qu’est Dieu n’est pas un objet parmi d’autres que l’on pourrait comparer, ou même préférer au champ, ou à la vigne, ou à ses proches, ou à son travail, sa fortune ou ses loisirs... Dieu est d’un autre ordre, celui de la profondeur ou de la visée, il est ce qui donne sens, valeur et dignité, il est ce qui porte une espérance, ce qui donne envie d’aimer malgré tout. Avoir la foi c’est s’ouvrir à cette dimension de la profondeur. Et cela donne envie de dire oui à la vie avec joie. Cela permet de voir tout autrement, en perspective, les êtres, les événements et les choses de la vie.

La foi peut venir après avoir fait l’expérience d’avoir rencontré le trésor dans son champ, ce changement de perspective et de vie n’est alors pas un devoir, c’est alors aussi naturelle que de se réjouir quand on trouve un trésor. Mais la foi était déjà un peu dans le fait de travailler le champ et dans la capacité à s’émerveiller devant le trésor inattendu.

Voilà pourquoi l’homme de cette première histoire ne part pas avec le trésor mais le remet en terre, car c’est là sa place, comme Dieu est la vie de notre vie, on ne peut donc pas découvrir Dieu comme un trésor et tourner le dos à la vie, au contraire, on aime alors à la fois et Dieu et encore plus la vie, et cela donne envie de s’investir plus intensément. Que fera le laboureur dans ce champ qu’il a choisi de faire maintenant vraiment le sien ? Comme souvent dans l'Evangile, Jésus laisse l'histoire en suspend afin de nous laisser écrire la suite de l'histoire avec notre propre vie, avec nos propres engagements dans le monde, avec et pour notre prochain. Comme la découverte du trésor lui a fait aimer le champ, dans l’enseignement sur la prière, Jésus nous invite à prier seul dans notre coin, et dans recherche intime de Dieu, découvrir et laisser émerger le « nous » du « Notre Père », cette humanité que la prière nous permet de réaliser.

Vivre le Royaume de Dieu c’est vivre quelque chose comme cette histoire, à notre façon, par petites touches ou par grands bons. Car parfois c’est un grand trésor que nous trouvons, parfois ce ne sont que de petites pièces d’or qui jalonnent notre histoire.

La connaissance de Dieu n’est pas le Royaume des cieux, cela peut aider à l’attendre et à l’accueillir. L’Église n’est pas le Royaume de Dieu, elle est cette simple travail dans le champ de notre être et de notre monde, en piochant un peu, elle est déjà une ouverture à cette dimension de la profondeur, une disponibilité à la découverte du trésor mis par Dieu en profondeur de notre monde.

Une seconde parabole

Mais Jésus ajoute une 2nde histoire. Cette fois :

« Le royaume des cieux est encore semblable
à un marchand qui cherche de belles perles. »

Le Royaume est déjà une recherche de beauté.

Dieu est cet amateur qui cherche de belles perles et qui nous trouve et qui nous reconnaît comme une perle précieuse, unique, qui saute de joie en voyant notre personnalité et ce que nous pourrions devenir, Dieu est cet amateur de beauté qui donne tout pour nous.

C’est pourquoi Jésus dit que le Royaume des cieux s’est déjà approché de nous. Car déjà Dieu nous a trouvé, il nous a reconnu, et il nous gardera. Pourtant, au départ, nous n’étions, excusez-moi, que comme une huître. Pas bien beau, pas bien intelligent, si peu vivant. Mais celui qui sait y voir, comme Dieu, qui sait voir l’intérieur, la profondeur des êtres, il peut se rendre compte qu’il y a dans cette huitre une perle d’un magnifique orient.

Qu’est-ce qui donne cet éclat à la perle ? La multitude des couches de nacre qui entourent un simple petit grain de sable. Notre perle est faite de couches d’amour, de rencontres, de belles pensées, de bonté, d’admiration et de prière, d’espérance et de service reçu, de service donné...

Voilà ce que nous sommes. Une perle de grand prix. En tout cas aux yeux de Dieu, il nous voit comme ça, et il s’y connaît en perles. Il ne voit plus l’huître que nous sommes aussi, ni nos imperfections, mais comme une lumière, un éclat de nacre, une lumière que nous sommes et qui ne brillerait pour personne s’il ne nous avait pas ouvert un peu.

Le Royaume des cieux, c’est ce Dieu qui aime la beauté, qui la cherche, qui nous trouve et nous dit : « vous êtes la lumière du monde... que votre lumière brille » (Matthieu 5:14-16).

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Lecture de la Bible

Matthieu 4:17, 23

Jésus dit : « 17 Changez de façon de voir, car le Royaume des cieux s’est approché »... 23 Jésus parcourait toute la Galilée, enseignant dans les synagogues, prêchant l’Évangile (la bonne nouvelle) du Royaume, guérissant toute maladie et toute infirmité dans la population.

Matthieu 5:1-3

Voyant la foule, Jésus monta sur la montagne, il s'assit, et ses disciples s'approchèrent de lui. 2 Puis il ouvrit la bouche et se mit à les enseigner : 3 Heureux les pauvres en esprit, car le royaume des cieux est à eux !

Matthieu 13:44-46

Jésus dit : « 44 Le royaume des cieux existe, il est semblable à un trésor caché dans le champ. Qu’un humain a trouvé, il le cache, et, à cause de sa joie, il part et vend tout ce qu'il a, et il achète ce champ.

45 Le royaume des cieux est encore semblable à un humain, un marchand qui cherche de belles perles. 46 Ayant trouvé une unique perle de grand valeur, il s’éloigna et a vendu tout ce qu'il avait, et l'a achetée.

 

Vidéo de la partie centrale du culte (prédication à 09:20)

(début de la prédication à 09:20)

film réalisé bénévolement par Soo-Hyun Pernot