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« Je dînerai avec lui, et lui avec moi »

(Apocalypse 3:20-4:8)

(écouter, culte entier, imprimer la feuille)

Dimanche 21 août 2022
Culte au temple de Cologny
prédication du pasteur Marc Pernot

Au milieu des visions surréalistes de Jean, nous avons ce verset qui tranche par son côté terre à terre tiré de la vie ordinaire, le Christ arrivant comme un ami en visite : « Voici : Je me tiens à la porte et je frappe à la porte. Si quelqu'un entend ma voix et ouvre la porte, j'entrerai chez lui, je dînerai avec lui et lui avec moi. »

Un événement de la vie présente

De quoi est-il question ? Qu’est-ce que cela peut bien signifier comme promesse et comme appel ?

On peut déjà dire que c’est important à cause du premier mot « Voici ! », car dans la Bible ce mot est une marque d’intervention de Dieu lui-même dans l’histoire humaine pour ouvrir une nouvelle étape décisive.

Ensuite, les verbes « je me tiens » er « je frappe » sont au présent. Ce n’est donc pas de la vie future ou de la fin du monde dont il est question mais de notre vie présente, et cela se présente aussi concrètement qu’un simple « toc ! toc ! » à la porte de notre vie quotidienne. Alors même que c’est Dieu qui vient à nous en Christ. C’est l’au-delà du réel qui vient frapper à la porte de notre monde réel. C’est la source de la vie qui vient frapper à la porte de notre vie quotidienne. Quelque chose qui est hors de portée de notre sagesse, de notre méditation, de notre spiritualité, de nos cultes, de nos organisations humaines. Et qui pourtant vient à nous et nous demande de faire quelques gestes de très concrets. Ouvrir la porte et dîner ensemble.

Pour quelles conséquences ? Ce n’est pas notre vie future qui est en cause, comme si notre geste de foi présent devait nous ouvrir les portes du ciel. Jean affirme quelques versets plus loin que les portes du ciel nous sont déjà grandes ouvertes, et pour en parler il reprend le style de ses visions fantastiques. Nous pourrions nous y intéresser une autre fois, pour aujourd’hui je vous propose de noter simplement que cette vie éternelle nous est déjà grande ouverte, et de chercher à entendre simplement l’appel que nous adresse aujourd’hui le Christ en frappant à la porte de notre vie quotidienne.

« Christ se tient là »

Dans ces premiers mots, c’est l’Évangile que Jean proclame, et c’est effectivement une révolution à 180° que le Christ à apporté par rapport aux religions dont le culte consistait à invoquer les dieux, à attirer leur attention par des rites, des prières et des sacrifices en comptant sur quelques faveurs en retour. Cette vision de Jean nous dit exactement l’inverse : en Christ, c’est Dieu qui vient à nous et qui cherche à attirer notre attention. C’est pourquoi notre culte commence systématiquement par l’annonce de la grâce que Dieu nous a déjà donnée. Le culte est une ouverture au Christ qui frappe à notre porte. Dieu n’a pas attendu notre invocation pour se tenir à notre porte, par amour, par intérêt. Dieu n’est pas un chien pour qu’on l’appelle d’un coup de sifflet.

En Christ, Dieu vient à nous, et en plus il se tient là, nous dit Jean, et il toque à la porte, il patiente encore et encore. Ce n’est pas seulement la grâce, c’est une grâce et une patience répétée sans limite. Ce temps long de la grâce de Dieu est indispensable car ce n’est pas à notre naissance que nous sommes déjà en mesure de sentir ce Dieu qui nous invoque personnellement. Certaines personnes entendent cet appel dès l’âge de 5 ou 6 ans, ou à l’adolescence, plus souvent c’est dans la trentaine comme Jésus quand il entend qu’il est le Fils bien aimé de Dieu. Il n’est jamais trop tard pour Dieu, et de toute façon, notre ouverture est au mieux progressive et encore à approfondir.

Une visite en ami

Dieu se tient donc là, toquant à la porte.

Quelle genre de personne se déplace pour voir quelqu’un, espérant sa présence, se tenant à sa porte le temps qu’il faudra sans s’impatienter dans la simple perspective de prendre ensemble un repas ? Seul un ami vient comme cela, par exemple pour manifester son soutien à son ami dans la tristesse, ou pour faire part d’un projet, ou simplement pour la joie d’être ensemble et de communier.

Le Christ ne se tient pas là comme une caméra de surveillance de Dieu pour nous compter les poux sur la tête. Comme je vous le disais, nous avons déjà été jugés par Dieu et son jugement est que nous sommes son enfant bien aimé. C’est ce que dit Jésus dans l’évangile selon Jean : « Dieu n’a pas envoyé son Fils dans le monde pour qu’il juge le monde, mais pour que le monde soit sauvé par lui. » (Jean 3:17).

LA porte à ouvrir

C’est bien ça le but de cette visite que nous fait le Christ, c’est pour sauver ce monde que Dieu aime. C’est de cela dont il est question ici. Clairement, en effet, il n’est pas marqué : voilà, Christ frappe à TA porte, si tu lui ouvres TA porte, le Christ viendra demeurer en TOI avec le Père. Nous pourrions avoir ce genre de message puisqu’on le trouve dans les derniers enseignements de Jésus selon Jean, par exemple, quand Jésus dit : « Si quelqu’un m’aime, il gardera ma parole, et mon Père l’aimera, et nous viendrons à lui, et nous ferons notre demeure en lui (ou près de lui). » Jean 14:23). C’est une belle réalité à vivre, mais ici, dans ce verset de l’Apocalypse de Jean, il n’est pas question de ma petite porte à moi, ou que le Christ entre dans mon petit cœur : il est question de LA porte, en attente d’une personne au monde qui puisse au moins l’entrouvrir. Quelle est donc cette porte qui est LA porte au singulier pour nous tous et toutes ? C’est la porte de notre monde.

Dieu ne veut pas ou ne peut pas entrer de force comme un brigand ou un tyran vulgaire. Il frappe à la porte du monde et attend qu’une âme charitable l’entrouvre, aussi peu que ce soit. Dieu est comme cela. Il a besoin de cela.

Il suffit d’une personne, nous dit le Christ. L’avenir du monde dépend d’une seule personne. C’est pour nous dire notre importance personnelle. Qui entendra, qui ouvrira ? Nous n’avons pas besoin des qualités d’un super héros, il nous suffit d’entendre toquer, puis de tirer la chevillette, la bobinette cherra. C’est l’étape décisive pour le salut du monde.

Pour entendre ce « toc ! toc ! » à la porte du monde, encore faut-il écouter. Et pour cela il faut ne pas être assourdi par le fracas du monde au point d’être fermé à tout espoir pour ce monde. Vous allez me dire qu’il y a de quoi être désespéré de la capacité des humains à sauver le monde, c’est en effet impossible aux humains et c’est précisément pour cela qu’il est essentiel d’écouter ce qui vient d’au-delà de ce monde venant frapper à la porte de notre monde et de notre humanité pour lui apporter ce qu’elle ne peut pas avoir. Écouter c’est le premier commandement, fondamental, du judaïsme, repris par Jésus : écouter Dieu, l’écouter frapper à la porte du monde. L’entendre et l’aimer, aussi peu que ce soit, c’est déjà lui entrouvrir la porte du monde. Alors, nous dit Jésus :

« J’entrerai chez lui »

Littéralement, il y a marqué « j’entrerai VERS lui » (en grec apo et non eis), c’est à la fois dynamique, et très personnel. Il avance vers nous car c’est nous qu’il aime et vers lequel il peut enfin aller. Et c’est ainsi qu’il va pouvoir entreprendre de sauver le monde entier.

Christ ne sauvera pas le monde de l’extérieur, avec un coup de baguette magique. Il nous fait aimer le monde comme il aime de monde, il nous donne d’espérer que ce monde soit sauvé comme il espère le sauver. Et le Christ nous montre que Dieu a besoin que nous lui ouvrions la porte du monde. Et que pour cela notre petite foi suffit.

À mon avis l’urgence pour le monde est aujourd’hui d’abord là : dans notre ouverture à Dieu rendant visite à notre humanité, pour se mettre à notre table avec nous, en amis. La question n’est pas que le monde entier devienne chrétien, cela ne sera jamais le cas. La question n’est pas non plus d’espérer que l’humanité entière s’y mette, ce ne sera jamais le cas non plus. La clef est que nous ouvrions la porte du monde à cet ami du monde qu’est Dieu, comme une première étape, comme source d’une impulsion fondamentale pour l’humanité, qui fera alors sa part.

Ensuite, il est question de manger ensemble, chose toute naturelle entre amis :

« Je dînerai avec lui et lui avec moi. »

Cette expression est un peu curieuse : car si le Christ dîne avec nous, pourquoi ajouter que nous dînerons avec lui ? Je dirais d’abord que cela rend exactement symétrique la place du Christ et notre place à nous, personnellement, à cette table. Il ne vient pas en roi, il est là en ami. Ce n’est pas le Christ-Dieu, c’est le Christ-compagnon qui est là, dans ce dîner en tête à tête. Comme un repas pris à deux sur la table de la cuisine, mangeant ensemble ce que nous avions, nous, dans le frigo et ce qu’il a amené lui, dans son sac. Le salut de monde prend racine dans cette communion où nous nourrissons ensemble et mutuellement.

Ensuite, cette double formule signifie que ce n’est pas seulement le Christ qui nous nourrit (ou qui s’offre à manger) : c’est nous aussi qui avons à nourrir le Christ. Nourrir le Christ dans sa présence au monde, alimenter cette présence chaque jour, voire plusieurs fois par jour.

Nous le nourrissons de notre prière « Que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel », nourriture qui nous mobilise avec lui pour espérer ensemble et agir chacun, Dieu et nous, comme nous le pourrons.

Nous le nourrissons en visitant cette part de foi qui existe au fond d’une personne rencontrée : ce qui, en elle pourrait aimer un peu, ou commencer à espérer. Nous nourrissons le Christ en en allant le visiter au fond de nous-même. Nous nourrissons le Christ en nous unissant à deux ou trois pour agir en son nom.

Et du Christ nous recevons son pain, le pain qui dépasse toute substance comme le dit Jésus dans le « Notre Père ». Le pain de sa Parole que nous méditons, que nous travaillons, que nous mastiquons pour mieux l’assimiler.

Pour débattre sur cette proposition : c'est sur le blog.

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Texte Biblique

Apocalypse 3:20-4:8

20 Voici : Je me tiens à la porte et je frappe à la porte. Si quelqu'un entend ma voix et ouvre la porte, j'entrerai chez lui, je dînerai avec lui et lui avec moi.

21 Le vainqueur, je lui donnerai de s'asseoir avec moi sur mon trône, comme moi-même j'ai été vainqueur et je me suis assis avec mon Père sur son trône. 22Que celui qui a une oreille entende ce que l'Esprit dit aux églises !

4:1 Après cela, je vis ! Et voici : une porte a été ouverte dans le ciel. Et la première voix que j’entendis était comme une trompette qui me parlait, disant : Monte ici, et je te montrerai ce qui doit arriver ensuite.

2 Aussitôt je fus saisi par l'Esprit. Et voici : un trône était dans le ciel, et sur ce trône quelqu'un était assis. 3Celui qui était assis avait l'aspect d'une pierre de jaspe et de sardoine, et le trône était entouré d'un arc en ciel qui ressemblait à de l'émeraude. 4 Autour du trône, vingt-quatre trônes, sur ces trônes, vingt-quatre anciens assis, habillés de vêtements blancs et portant des couronnes d'or sur leurs têtes. 5Du trône sortent des éclairs, des voix et des tonnerres. Et sept lampes de feu brûlant sont devant le trône, ce sont les sept esprits de Dieu. 6Devant le trône, comme une mer de verre semblable à du cristal. Au milieu du trône et tout autour du trône, quatre êtres vivants pleins d'yeux devant et derrière.7Le premier être vivant ressemble à un lion, le deuxième être vivant ressemble à un taurillon, le troisième être vivant a comme un visage humain, et le quatrième être vivant ressemble à un aigle en plein vol. 8Les quatre êtres vivants ont chacun six ailes, et ils sont pleins d'yeux tout autour et au dedans. Jour et nuit, ils ne cessent de dire : « Saint, saint, saint est le Seigneur Dieu, le Tout-Puissant, celui qui était, qui est et qui vient ! »